Proverbe chinois

Si nous avons chacun un objet et nous nous les échangeons, nous avons chacun un objet. Par contre, si nous avons chacun une idée et que nous nous les échangeons, nous avons chacun deux idées.

dimanche 17 février 2008

Regard neuf


Une certaine chose m'a toujours intéressé, percevoir, comprendre les choses telles qu'elles sont. C'est une idée que j'ai retrouvée plus tard, par hasard, en lisant sur le bouddhisme et le Zen. Certaines idées de cette philosophie sont très intéressantes et trouvent des échos particulièrement intéressants dans les arts visuels. Par exemple, l'idée de dualité. On a tendance, pour comprendre, à vouloir étiqueter, mettre un mot sur une chose. Ainsi, on a l'illusion de l'avoir saisie. Illusion parce que souvent le mot nous éloigne de ce qu'il désigne parce qu'il a une définition qui est fixe et limitée, ce qui n'est pas le cas de la réalité. Comprendre à travers les mots - ce qu'on fait généralement - induit dans notre perception du monde des dualités qui divisent ce qui est uni dans la réalité. Pour des fins de communication les mots et les définitions sont utiles, mais pour comprendre et faire l'expérience du monde, cela nous en éloigne plus souvent qu'autrement. On s'arrête au mot et on ne sent plus la réalité. Ce que je dis est un peu abstrait et confus, mais cela prend du sens avec le très lucide exemple de Magritte. La première fois que j'ai vu son tableau Ceci n'est pas une pipe, je me suis posé des questions sur sa santé mentale. Après coup, j'ai compris, ce n'est pas une pipe, c'est une peinture représentant une pipe. Ça a l'air évident, mais la confusion s'installe souvent. On croit avoir compris quelque chose dès que cette chose trouve référence dans ce avec quoi on a déjà eu contact et qu'on a catalogué. Ainsi on a rarement un regard neuf, on regarde toujours en essayant de repérer ce qui est identifiable. Rarement on essaie de voir, le plus souvent on essaie de reconnaître. C'est ce qui m'est arrivé la première fois que j'ai vu le tableau de Magritte; c'est une pipe, ok, next! Et c'est ici que le tableau prend toute sa force; le peintre a écrit bien lisiblement; Ceci n'est pas une pipe. Ah! Questionner nos perceptions, nos préjugés, nos mécanismes de compréhension; pour éventuellement s'en libérer et faire une expérience du monde plus directe, plus authentique. Voilà une des tâches de l'Art. Ceci ne veut pas dire que les mots, les définitions, les concepts n'ont pas leurs place et utilité, seulement, il ne faut pas confondre la Lune avec le doigt qui la pointe. C'est entre autre un grand problème de l'appréciation de la photo (dans le domaine artistique), c'est une représentation qui peut être tellement fidèle de la réalité qu'on oublie que la photo n'est pas ce qu'elle montre. Je suis toujours intéressé par les démarches qui touchent à cette problématique. Il y a quelques temps j'ai fait un projet qui voulait aussi questionner nos perceptions. C'est une série de photos abstraites où il est très difficile de jurer de ce qui a été photographié, avec un titre qui suggère un paysage qu'on peut retrouver avec de l'imagination dans l'image. Il n'y a pas de manipulation dans Photohsop autre qu'ajustement de contraste, couleur, etc. L'idée était de poser la question «que voyez-vous»? Ce que l'imagination projette sur une image abstraite (le paysage) ou ce qui a été photographié (matière plus ou moins identifiable). Ceci n'est pas de la tôle oxydée, c'est un sommet de montagne enneigé, ou bien l'océan, ou bien...

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Diaporama du projet Limites de la rationalité